Un duo de géographes s’intéressant au concept de l’habiter dans les espaces touristiques 
A mi-chemin entre les démarches sociologiques et géographiques, un duo d’auteurs est à la manœuvre de cet essai. Thomas Daum et Eudes Girard sont agrégés de géographie. (...)
L’ouvrage se structure autour des différentes composantes de « l’habiter » : imaginer, accéder, se loger, visiter, se restaurer, rencontrer, culpabiliser (assez déroutant et dont la cohérence n’est pas toujours très claire), se souvenir et penser.
En 2017, 800 millions de touristes parcourent le monde.  (...) Les auteurs rappellent qu’il est nécessaire de rester critique sur cette donnée : les États-Unis sont devant en valeur et la Chine serait la première destination mondiale en nombre d’individus en incorporant Hong Kong et Macao. A l’échelle nationale, 98% des touristes en Inde sont des Indiens. Des différences sont très marquées à l’échelle régionale : les nationaux sont ultra-majoritaires à Shimla (grâce à l’accessibilité de la ville) alors que les Occidentaux en quête d’authenticité sont très nombreux dans la vallée de Padum dans le Jammu-et-Cachemire.
La géographie culturelle n’est pas oubliée. L’imaginaire du voyageur et du touriste se construit autour d’un triptyque : « la ruelle européenne », « la plage de sable » et « la jungle tropicale ». Ces aménités sont partagées par les destinations en vogue : la Croatie, l’Espagne, la Thaïlande. Depuis le début des années 2000, les agences de voyages sont concurrencées par les nouveaux usages des NTIC. Elles modifient l’organisation de l’ensemble du secteur avec des réservations sur-mesures de logements ou de transports (Booking, Kayak). De nouveaux acteurs de l’e-tourisme apparaissent dans un marché à maturité (Airbnb). Les guides touristiques résistent et se maintiennent : le guide du Routard représente 25% du marché (face aux guides Géo, Lonely Planet, Petit Futé…).  
Brésil, Russie, Italie… L’analyse du site touristique du Clos Lucé à Amboise (37) éclaire les stratégies et cibles du marketing pour développer un imaginaire touristique. 15% du chiffre d’affaire est dépensé pour la publicité à destination des marchés étrangers (documentaires patrimoniaux, traductions, films…). Le Clos Lucé est devenu « un pôle touristique qui a changé d’échelle, adapté à la mondialisation » (page 31). Les lieux peuvent changer de nom pour des objectifs promotionnels. C’est le cas de la gare de Blois à 15 km du château en 2014 : elle devient la gare de « Blois-Chambord » pour une meilleure identification du site et donc l’espérance de nuitée supplémentaire. Le décalage entre la vision des guides (« figés dans le temps » autour de la notion de terroir et de caractéristiques immuables) et la réalité géographique (à partir des mutations spatiales notamment architecturales et des systèmes productifs entraînant la modification des paysages) est précisément décrit et analysé de façon convaincante grâce à des exemples bien choisis (Venise, Pays d’Auge en Normandie, village espagnol).  
Analysant le voyageur comme un individu lancé dans une quête d’exotisme et d’authenticité, les auteurs réussissent leur pari. Le style, proche des exigences journalistiques tout en restant à la fois accessible et pointu, alterne entre des analyses de fond sur les mutations de ce secteur et des exemples variés (notamment la France) développés sur deux pages.